Les loges font parties du paysage du vignoble rémois. Ces petites cabanes de pierre naguère utilisées pour stocker le matériel nécessaire à l’entretien de la vigne ou pour souffler entre deux labeurs sont en pause, parfois en déclin, sur le terrain des exploitants de la région. Fière d’un parcours expérientiel riche et passionnant, la maison Krug ajoute cet été une nouvelle étape à son aventure : un bond dans le temps dans une loge située à Trépail, tout juste remodelée comme un hommage par l’architecte Stéphanie Ledoux (AW2).
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Au commencement
« Je dois l’avouer, je passais à côté sans plus la voir », confesse sans détour Olivier Krug, actuel directeur de la maison, issu de la sixième génération de la famille. Dans les alentours de Reims, on en dénombre pas moins de 200 éparpillées sur les différentes exploitations vinicoles de la région. C’est à Trépail, bourgade située à moins de 30 minutes de la grande ville, là où Krug détient une parcelle, que la maison s’est penchée sur l’histoire de cette loge qui s’était effacée au fil des années.
« Lors des visites que nous organisons de nos domaines, nous parlons avant tout de notre savoir faire. Celui-ci commence dans le vignoble… Là où se trouvent les loges », explique Olivier Krug avant de préciser que, jusque là, ces expériences n’incluaient pas de moment d’hospitalité. Voilà chose corrigée grâce à la mise à jour de cette fameuse loge un temps oubliée, un chantier entrepris avec le concours de l’architecte Stéphanie Ledoux, une habituée de la maison.
« Nous souhaitions nous ouvrir à nouveau vers le vignoble. » – Olivier Krug
Qu’est-ce qu’une loge champenoise ?
Olivier Krug se tourne vers son architecte pour apporter une définition des plus précises à la question. « La loge est un abri dans les vignes qui servait de protection pour les vignerons et leurs équipements. Elles étaient, à une époque, une nécessité primordiale pour les travailleurs des champs, une fonctionnalité qui s’est avérée moins nécessaire quand les techniques ont évolué. »
Si elles n’ont pas disparu, les loges sont figées dans le temps. Elles se sont même muées en un élément constitutif du paysage de la Champagne et sont désormais toutes protégées au titre du patrimoine de l’UNESCO. « Elles ont été purement fonctionnelles, sont devenues paysagères et occupent désormais la place de symbole patrimonial », étaye Stéphanie Ledoux.
La loge Krug, entre héritage et futur
Le chantier, à la fois complexe et fulgurant, a su conserver les caractéristiques d’une loge champenoise tout en la propulsant dans l’univers contemporain de Krug.
« Elle n’était pas dégradée, elle avait juste souffert de l’épreuve de l’inactivité. Elle possédait des éléments forts comme sa charpente, assez belle, qui était masquée par un plancher intermédiaire qui ne permettait pas de la voir — nous nous en sommes débarrassé. Son échelle et sa morphologie dans le paysage étaient aussi particulièrement intéressants : l’idée était de ne pas modifier cette relation au paysage qui est en soi l’histoire première que nous tenions à raconter. Et puis, dans cette loge demeuraient tant de vestiges du passé ! Un foyer dans un coin, dégradé certes, mais toujours là. Une grande table, aussi, qui avait dû servir aux vignerons pour qu’ils puissent prendre leur repas… »
L’idée derrière cette rénovation était de faire de cette maisonnette un point convivial porteur d’héritage dans le circuit des visites organisées par la maison, mais aussi d’en faire un exemple de durabilité, une valeur forte de Krug.
« La toiture était dans un état correct, explique Stéphanie Ledoux, mais notre premier défi fut de rendre la loge Krug plus performante d’un point de vue environnemental. Parce que dans l’idée de lui restituer une fonction, il y avait aussi cet objectif de devenir performant au niveau thermique, pour l’inscrire dans une vraie continuité. » Une manière d’adapter un patrimoine vivant à son usage contemporain, un projet d’ailleurs labellisé à l’HQE (haute qualité environnementale).
Si un maximum d’éléments ont été conservés en hommage au passé, la loge Krug a néanmoins été remodelée afin de tirer un parti optimal de cet environnement riche qui l’entoure. Un mur a entièrement été ouvert et vitré afin de permettre aux visiteurs une immersion instantanée dans le vignoble. « La vigne est seulement à cinq-six mètres, s’émerveille Olivier Krug. Quand on ouvre le rideau de cette nouvelle percée, on est face à la vigne : on raconte la vigne. »
Et pour la raconter, quoi de mieux que la terre ? Cette terre si importante en Champagne, diverse et riche, qui donne à ses breuvages tout leur sens. Des carottes (échantillon cylindrique) de terre arrachées à différentes parcelles de la maison Krug viennent ainsi orner les murs de la loge, en hommage à son patrimoine naturel.
« Cela permet à chacun de comprendre que la vigne ne pousse dans une terre plate dans laquelle ses racines se contentent de descendre à 3 centimètres et de se nourrir d’engrais et d’eau. C’est une terre dans laquelle les racines vont chercher la roche, les minéraux, la pureté ou une forme de richesse, un gras », précise Oliver Krug.
Tout dans la loge Krug fait écho au terroir et au territoire, à commencer par sa sublime table centrale autour de laquelle se poursuivront les discussions et les dégustations, sculptée dans une roche de Bourgogne brute.
La loge accueillera pour le moment uniquement les invités de la Maison Krug. Site internet.
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