À observer de près les différentes propositions parfois tape-à-l’œil, on ne peut que s’en réjouir. Le choix de la modestie – ce n’est pas toujours le cas à Paris – et d’un projet à rebours des grands gestes architecturaux a convaincu. Le démarrage de ce chantier complexe est prévu en 2019 pour un achèvement en 2024, année olympique où Paris sera, plus encore qu’à l’accoutumée, sous le feu des projecteurs. La tour Montparnasse, l’incomprise, écrit une nouvelle page de son histoire pour renouer avec les Parisiens. Une réconciliation qui a un coût : 300 millions d’euros, intégralement issus du secteur privé.
Retour sur six autres projets qui étaient en lice.
1/ Studio Gang
Avec son Aqua Tower bleutée à Chicago, Jeanne Gang a réussi le pari de s’imposer dans la ville emblématique des gratte-ciel. Faire table rase du passé : c’est l’attitude qui a guidé la proposition de l’Américaine. Elle présentait donc une architecture générique, peu parisienne, qui aurait pu se trouver ici ou ailleurs… La métamorphose s’opérait par une façade facettée offrant à chaque étage des points de vue différenciés sur la ville. Malgré le théâtre de verdure perché, un jardin surélevé en pied de tour ou un observatoire panoramique comme dans la plupart des projets, la « monumentalité généreuse » défendue par Studio Gang n’a finalement pas convaincu assez pour atteindre la première place du podium.
2/ PLP
Peu connue du grand public, l’agence britannique PLP est pourtant un mastodonte du secteur, habituée des gratte-ciel en tous genres à Londres, Doha ou Amsterdam. Pour transformer la tour Montparnasse, des façades écrans – un poncif du genre – et une mise en lumière XXL signée Yann Kersalé métamorphosaient le bâtiment par l’événementiel. La courbure de l’édifice était conservée mais avec une enveloppe plus avenante. Les pignons se faisaient le réceptacle de la touche écolo, avec des balcons et des terrasses sur l’intégralité de la hauteur de la tour, ainsi qu’un ascenseur panoramique transparent. La promesse d’un spectacle qui n’a décidément pas suffi pour l’emporter !
3/ Dominique Perrault
Jamais rassasié, l’architecte français qui réalise le village des athlètes de Paris 2024 mais qui planche aussi sur le devenir de l’île de la Cité, au cœur de la capitale, se voyait bien en héros de la tour Montparnasse version 2024. Pour ce faire, le père de la BNF avait imaginé de lui adjoindre une seconde tour haute de 300 mètres, offrant 50 000 m2 de surfaces supplémentaires pour saisir « l’opportunité historique de faire de Montparnasse un lieu qui ne s’endormirait jamais ». Le nouveau bâtiment devait notamment accueillir les usagers pendant les travaux de la première. Sur le plan environnemental, cette « ville verticale à énergie positive » promettait de produire plus d’énergie qu’elle n’en consommait…
4/ AS.Architecture-Studio
L’agence AS.Architecture-Studio s’était associée au paysagiste Michel Desvigne pour « transformer un modèle statique fermé en une tour vivante, ouverte, flexible et organique ». Au programme, de nouveaux usages, comme des work-cafés, une piscine-spa au 42e étage, des commerces mais aussi un restaurant, un cabaret et un observatoire panoramique au sommet du bâtiment. Pour modifier l’image de l’édifice sans le transformer trop brutalement, la façade plissée et transparente intégrait des jardins habités. Quel était l’objectif de cette proposition ? Que la tour devienne l’« emblème d’une modernité intelligente et environnementale ». Cela n’a pas suffi pour convaincre…
5/ OMA
C’est un projet radical que Rem Koolhaas avait imaginé en se penchant sur l’épineux cas de cette tour mal-aimée. À l’inverse de ses concurrents, la star néerlandaise ne semblait pas avoir cherché à rendre le bâtiment plus beau. « Les gratte-ciel sont là non parce qu’ils méritent la vie éternelle, mais parce qu’ils refusent de mourir », nous disait l’agence OMA, qui avait répondu par une tour à deux visages, façon Janus. D’un côté, la courbe fumée bien connue des Parisiens dans une version plus contemporaine. De l’autre, une maille de bronze intégrée dans une peau de verre. L’un des objectifs attendus : « Assumer rétroactivement sa proximité avec la tour Eiffel en explorant le répertoire technologique et esthétique contemporain. »
6/ MAD
Peu connue pour sa subtilité, l’agence chinoise MAD, associée aux Français de DGLA pour l’occasion, profitait de la situation isolée de la tour Montparnasse et misait tout sur une façade réfléchissante composée d’éléments en verre aux angles bien précis. Transformé en miroir géant, le bâtiment reflétait ainsi le Tout-Paris, de la tour Eiffel au tissu haussmannien. Baptisé « Mirage », le projet envisageait l’illusion d’optique comme le moteur de la transformation. Du fonctionnement du gratte-ciel, on ne saura finalement pas grand-chose, les architectes ayant concentré leurs efforts « pour réexaminer et réfléchir à la manière dont l’humanité peut coexister et interagir avec la tour ».