Le raku, qualificatif appliqué à une technique de céramique japonaise née au XVIe siècle, fait son entrée chez Empreintes dans sa forme la plus contemporaine. Réinventé par une poignée de créateurs basés en France (c’est là tout le concept de ce showroom dédié aux métiers d’art hexagonaux), le raku s’expose et s’achète en plein cœur de Paris, jusqu’à fin mars.
On le sait, le thé est bien plus qu’une simple boisson au Japon… si bien que, depuis des siècles, on lui dédie un véritable rituel. L’histoire de ce moment spirituel se raconte en parallèle de celle du raku. Alors que pendant des siècles, elle fut réservée à l’aristocratie, la cérémonie du thé s’étend aux classes populaires au XVIe siècle, sous l’impulsion du grand maître Sen no Rikyû (1522-1691). Il en démocratise et simplifie les codes, et parmi eux l’apparence du chawan (bol à thé), objet sacré et onéreux dont seule l’élite pouvait alors s’équiper. Autrefois décoré d’ornements fins et précieux, il devient un modeste objet cérémoniel, modelé pour la première fois par le potier Chôjirô à la demande de Sen no Rikyû.
La technique du raku implique des règles novatrices pour l’époque. Le chawan est tout d’abord modelé à la main et non sur un tour de potier. Là où la cuisson classique de la céramique se fait pendant de longues heures en montant progressivement le thermostat, la fabrication du raku se fait « à basse température » car la pièce est placée directement dans un four à 1 000°C dont elle est extraite au bout d’une heure et demie seulement. Elle subit alors un important choc thermique, qui crée les craquelures et boursouflures, irrégulières et imprévisibles, caractéristiques de cet art. Encore incandescent, l’objet est ensuite recouvert d’éléments combustibles souvent végétaux, comme des copeaux de bois, dans une cuve. Sous l’effet des oxydes (de cuivre, de fer, d’argent…), le bol se pare de sa couleur finale tandis que ses craquelures se soulignent de noir. Ainsi, chaque bol est unique, fruit du hasard, et c’est là toute la magie du raku…
Dans les années 50, le raku franchit les océans et séduit en particulier les Etats-Unis et la France. Si la tradition est respectée à la lettre au Japon, les Occidentaux se l’approprient et la détournent. D’une cuisson réservée aux bols à thé, le raku se transforme en véritable mouvement stylistique qui sublime toutes les typologies. De cet héritage sont issus les artistes actuellement exposés chez Empreintes. Jean-François Delorme, Barbara Billoud, Geneviève Chevallier ou encore Marion Gayraud sont tous tombés amoureux de ce savoir-faire ancestral…
Un passage chez Empreintes sera aussi l’occasion de découvrir le livre « Chawanya – celui qui fait les bols à thé » de Raku Kichizamon, XVe maître de la dynastie des potiers raku et directeur du Raku Museum de Kyoto. Le 26 janvier, une cérémonie du thé exceptionnelle sera organisée au sein du concept-store en présence de trois femmes maîtres de thé. Une parenthèse hors du temps…
> Empreintes. 5, rue de Picardie, 75003 Paris. Jusqu’au 31 mars.