Lorsque la décision du gouvernement annonçant que les musées ne rouvriraient pas est tombée le jeudi 10 novembre, la communauté du couvent de la Tourette a été abasourdie. L’exposition sur les tapisseries contemporaines qu’elle avait échafaudée avec le Mobilier national resterait donc encore quelques semaines supplémentaires à l’abri des regards. Quant aux visiteurs, qui constituent la principale source de revenus de cette communauté de dominicains, ils ne reviendraient pas de sitôt…
Cet ensemble architectural remarquable en béton a été construit par Le Corbusier en 1960 au sommet d’une colline à Eveux, dans la banlieue nord-ouest de Lyon, avec l’aide du compositeur Iannis Xenakis (1922-2001), ingénieur-architecte du projet. Lieu de silence et de paix emblématique de l’architecture moderniste du XXe siècle, il déroule une symphonie d’ombres et de lumière au cœur d’un domaine verdoyant de 76 hectares.
Les six salariés de La Tourette menacés
Cette icône architecturale accueille tous les ans d’importantes expositions d’art contemporain. Des pointures comme François Morellet, Lee Ufan ou Anish Kapoor ont été exposés ici et ont séjourné entre ces murs. Car le lieu, doté de 50 chambres en plus de celles des moines, accueille toute l’année des visiteurs. « Nous recevons aussi de nombreux étudiants en architecture qui séjournent ici pour des workshops. Ils vont dessiner, faire des relevés, des croquis et dormir dans une chambre dessinée par Le Corbusier, ce qui n’est pas si fréquent… Surtout, ils font ici l’expérience d’une architecture faite de béton et de lumière », relève le frère Marc Chauveau, responsable des activités culturelles du couvent. Afin d’assurer cette activité d’hébergement, les frères sont épaulés par une équipe de six salariés, dont les emplois sont aujourd’hui menacés.
Rouvrir l’hôtellerie dès que possible
Depuis toujours, le Couvent de la Tourette, où vivent et prient une douzaine de moines dominicains, est largement ouvert à la culture contemporaine : c’est ainsi qu’en 1997, la communauté a demandé au designer britannique Jasper Morrison de dessiner des chaises pour équiper son réfectoire… où elles se trouvent toujours. Cette activité culturelle subit de plein fouet la crise sanitaire. Les recettes du couvent s’effondrent puisque la majorité de ses recettes proviennent de l’hôtellerie et des visites. Le fonctionnement du couvent est en péril. « Les conséquences du confinement sont dramatiques pour nous. Nous limitons au maximum les dépenses, nous avons fermé une partie des lieux et vivons désormais dans un espace réduit du couvent. Nous avons subi une perte d’activité de 70 %, ce qui a des conséquences graves pour l’avenir de La Tourette », déplore le frère Marc Chauveau. « Notre souhait est de pouvoir rouvrir l’hôtellerie dès que possible, mais en attendant nous lançons un appel aux dons pour nous aider à traverser cette phase délicate. »
Grâce au financement participatif, le couvent pourra assurer l’entretien du bâtiment et son fonctionnement, mis à mal par une fermeture prolongée. Une façon de pouvoir continuer à proposer visites guidées, ouvrages sur l’architecture du couvent, catalogues d’exposition et séjours lorsque ce trésor de l’architecture brutaliste pourra rouvrir ses portes au public.
> Appel aux dons ouvert sur Kisskissbankbank.
> Couvent de la Tourette. Route de la Tourette, 69210 Éveux.