La lampe Shogun de Mario Botta (1986)

« J’ai dessiné des lampes qui sont des êtres », plaide le designer Mario Botta. De fait, sa Shogun ne manque pas de personnalité… Elle est même devenue l'incarnation du design des années 80.

Né en Suisse en 1943, Mario Botta est un phénomène. Dans ce Tessin, ce canton où l’on parle italien si proche de Milan, il a démarré sa carrière à 16 ans ! Étudiant à Venise, il est devenu familier de Le Corbusier, Louis Kahn et Carlo Scarpa avant de creuser son propre sillon entre archi et design. Pour Botta designer, « une lampe est un objet qui crée de la lumière même lorsqu’il n’y en a pas. Elle doit être un artefact, doté d’une image… C’est pourquoi j’ai dessiné des lampes qui sont des êtres. Shogun est une personne. Elle a une tête, un corps, des pieds et un nombril. »

La lampe « Shogun » de Mario Botta (1986) est rééditée par Artemide.
La lampe « Shogun » de Mario Botta (1986) est rééditée par Artemide. DR

En 1986, quand Artemide l’édite, l’heure est au post-modernisme. Le terme shogun, qui désigne un général dans le Japon ancien, évoque le best-seller de James Clavell, adapté pour la télévision en 1980. Cependant, le designer s’est vraisemblablement plutôt inspiré du film Ran d’Akira Kurosawa (1985) et des armures des seigneurs de guerre. Mais le dessin de Shogun puise aussi son inspiration ailleurs. Son pied noir et blanc rappelle les façades en marbre rayé des églises toscanes, un registre qui était déjà une source d’inspiration à la fin des années 20 pour l’architecte viennois Adolf Loos (1870-1933). Ce contraste ressort également durant les eighties dans les créations du groupe Memphis.

Lampe « Shogun » de Mario Botta (1986) est son astucieux jeu d’abat-jour.
Lampe « Shogun » de Mario Botta (1986) est son astucieux jeu d’abat-jour. DR

Une lampe intemporelle

En 2015, c’est le duo néerlandais Scholten & Baijings qui perpétue ces références pour Hay. En réalité, cette esthétique revient périodiquement. Elle n’évoque aucune époque… ou les rappelle toutes ! Dans la Shogun, on retrouve aussi l’idée de la forteresse, typique de Botta. Et les deux diffuseurs de lumière orientables, en tôle d’acier perforée, ressemblent à des casques, créant des jeux de lumière sur les murs. Le but est atteint ; Botta a dessiné une lampe qui se remarque même éteinte. C’était encore plus vrai avec la version lampadaire, pas rééditée par Artemide. La Shogun, enfin, souligne un point commun entre design et architecture : cette capacité à qualifier l’espace. À travers cette redécouverte, Artemide rend un bel hommage aux architectes-designers et à leur don pour les proportions justes.

Lampe « Shogun » de Mario Botta (1986) rééditée par Artemide.
Lampe « Shogun » de Mario Botta (1986) rééditée par Artemide. Artemide

> Lampe Shogun de Mario Botta, 556 €. Artemide.