« Un tableau n’est plus une construction de couleurs et de traits, mais un animal, une nuit, un cri, un être humain, il forme un tout indivisible », affirme Karel Appel (1921-2006). Quand il s’installe à Paris, en 1950, l’artiste a 29 ans et un langage déjà bien défini, à la fois spontané et coloré. Diplômé de l’Académie royale des beaux-arts d’Amsterdam, il est l’un des cofondateurs de Cobra (Copenhague, Bruxelles, Amsterdam), collectif qui compte dans ses rangs le Danois Asger Jorn et le Belge Pierre Alechinsky. Face aux partisans de l’école de Paris, qui défendent la figuration, et aux francs-tireurs de l’abstraction, ces jeunes révolutionnaires revendiquent le retour à l’art primitif et s’intéressent tout particulièrement aux dessins d’enfants. Leurs héros ? Picasso, Matisse et, surtout, Dubuffet, qui vient d’inventer l’expression « art brut ».
Cobra se saborde en 1951, mais Appel reste fidèle au refus « du principe esthétique, du style, expression du contenu bourgeois appelé goût ». Cependant, de ses paysages imaginaires, de ses animaux colorés ou de son Enfant interrogeant (tableau dont il crée plusieurs versions) suinte toujours un sentiment d’inquiétude. Ses œuvres portent l’empreinte d’un siècle marqué par deux guerres mondiales. « Je peins comme un barbare à une époque barbare. Je peins la vie telle qu’elle se déroule autour de moi. Dure, vivante, belle, cruelle, formidable », déclare l’artiste en 1962.
Délaissant la France, Karel Appel voyage alors aux États-Unis, où il découvre l’action painting de Jackson Pollock, puis au Mexique, en Amérique du Sud, en Inde… Chacune de ses villégiatures favorise l’exploration d’autres médiums, telle la céramique, qu’il expérimente à Albisola, petite ville balnéaire de la côte ligure devenue le fief du peintre et sculpteur Lucio Fontana. Certaines de ses œuvres italiennes sont présentées dans le cadre de cette rétrospective, parmi d’autres raretés comme la peinture-testament réalisée en 2006, peu avant la mort de l’artiste.
« Karel Appel. L’art est une fête ! ». Au musée d’Art moderne de la ville de Paris (XVIe), jusqu’au 20 août.
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