Tim Simpson et Sarah Van Gameren se sont rencontrés en 2005 au Royal College of Art, où ils étudiaient sous la direction de Ron Arad. Ensemble, ils ont cofondé Glithero à Londres dans la foulée. En 2009, on découvrait leur travail avec la série « Les French », des consoles en carton perchées sur de graciles pieds en bronze façon bambou, exposées chez Fumi, la galerie pionnière de l’East End. L’année suivante, Tim et Sarah, convaincus depuis toujours que « le processus est aussi important que le produit fini », publiaient en cinq exemplaires une anthologie d’herbes sauvages glanées dans le voisinage de leur studio londonien : Botanical Archive.
On peut être tenté de considérer l’intérêt des Glithero pour les herbiers comme un écho design à la récolte d’herbes sauvages prônée par les chefs de file de la nouvelle cuisine nordique. Mais pour Sarah Van Gameren, cela reste avant tout une démarche artistique : « Emprunter les vertus de la photographie pour les rediriger vers le monde du design : voilà comment nous nous sommes mis à récolter des végétaux afin de les utiliser comme sujets pour nos céramiques. » Mises sous presse, des mauvaises herbes poussant dans les fissures des murs ou les interstices des trottoirs de la périphérie de Londres ont peu à peu constitué un herbier, poétique et urbain, qui s’est révélé un matériau clé pour une ribambelle de projets.
Une invitation à renouer avec la pratique des herbiers
« Chaque printemps, au moment où tout pousse, c’est devenu un rituel : nous examinons soigneusement la rue, en quête de nouvelles espèces botaniques pour remplir les presses du studio », raconte Sarah. Dans leur collection « Blueware », les herbes soigneusement séchées ont été appliquées sur des objets de céramique exposés aux rayons UV, ce qui a permis de créer, par effet de réserve, de délicats motifs végétaux. « Notre idée est de constituer un herbier à partir d’une cueillette locale. Pour notre premier client, à Londres, nous avons travaillé avec nos propres archives de plantes. Pour le deuxième, aux Maldives, nous sommes allés les ramasser sur place. Et là, nous venons de terminer un grand panneau mural à New York en utilisant des algues », poursuit Sarah.
Leur récente collection de carreaux « Botanical Tiles » a, elle, été développée aux Pays-Bas (d’où Sarah est originaire), avec un atelier qui se consacre depuis quatre siècles à la peinture sur céramique « dans la plus pure tradition néerlandaise ». « Nous leur avons proposé de s’appuyer sur leur expertise de dessin en introduisant une différence de technique. C’est une sorte de sgraffito puisque, au lieu de dessiner au pinceau, on utilise un couteau pour “griffer” la dernière couche d’émail. Le motif, toujours tiré de notre herbier, est juste esquissé sur écran textile avec une poudre colorée qui disparaît dès que l’on souffle dessus », explique-t-elle.
Non au « fast design » !
Leur dernier projet en date, « Botanical Rugs », a été mené en collaboration avec la Manufacture Cogolin et est exposé en exclusivité dans le showroom parisien de la maison varoise jusqu’au 14 septembre. « Avec Cogolin, nous avons voulu, là aussi, continuer à explorer le travail initié avec les “Botanical Tiles”, mais en l’adaptant cette fois à l’univers technique du tapis. » Pour ces quatre tapis noués main en soie, laine et lin, Tim et Sarah ont « pioché dans [leur] herbier des dix années écoulées ». En explorant, à leur rythme, le potentiel créatif d’une idée à travers différentes techniques et en nouant des collaborations basées sur le respect commun, comme sur l’écosystème local, les Glithero prouvent, une fois de plus, que le fast design ne passera pas par eux.
> La Manufacture Cogolin. 30, rue des Saints-Pères, 75007 Paris. Tél. : 01 40 49 04 30.