Dans votre bagage, vous n’oubliez jamais…
Herbert Ypma : Ça fait une vingtaine d’années que je voyage avec un seul bagage. Le contenu est toujours le même: deux tee-shirts blancs, un noir et un bleu marine, des shorts, blanc et bleu marine, un châle en cachemire marine, des Converse blanches, une chemise et un bermuda de bain marine également. Et, dans l’avion, je porte toujours un costume en lin noir, avec une chemise en lin blanc et une cravate noire en soie tricotée ainsi que des brogues (chaussures à lacets décorées de pièces de cuir perforé, NDLR) noires. De cette façon, mon costume ne sera pas trop froissé et correspondra à tout type de code vestimentaire.
Avez-vous des rituels quand vous voyagez ?
Dans l’avion, je ne bois que de l’eau, je ne mange qu’à l’heure du repas de mon pays de destination, j’utilise mon grand châle en cachemire comme couverture et, dès que j’atterris, je mets ma montre à l’heure locale. En faisant cela, je n’ai jamais souffert d’un quelconque décalage horaire en vingt ans.
Plus deux-roues que quatre-roues
Êtes-vous plus voiture ou vélo ?
Herbert Ypma : suis, à n’en pas douter, beaucoup plus vélo ou scooter. Les deux- roues sont nettement plus amusants que les « quatre-roues ».
Avion, train ou bateau ?
Je peux choisir, je préfère de loin le train à l’avion, surtout le train de nuit. La même préférence vaut pour le bateau. J’adore m’en- dormir en mer, avec cette sensation si particulière, à l’arrivée, que pro- cure ce mode de locomotion. Pour moi, le train ou le bateau confèrent au voyage un esprit d’aventure.
Nature ou ville ?
Les deux! Je pense que le contraste joue un grand rôle dans la vie. J’aime les villes denses comme Hongkong, New York, Londres, Paris, Marseille ou Mexico. Et puis j’apprécie vraiment de pouvoir ensuite leur échapper en allant en pleine nature. Faire du surf à Ditch Plains,
près de Montauk, aux États-Unis, après un séjour à Manhattan, camper et surfer à Sai Wan Beach, à deux pas de Hongkong, ou pratiquer la pêche sous-marine dans une calanque à Cassis, après quelques jours à Marseille.
« Choisir entre mer et montagne m’est très difficile »
Montagne ou mer ?
Herbert Ypma : Là encore, les deux. J’ai grandi en pratiquant la voile, la plongée et le surf, mais aussi en faisant du ski. Choisir entre la montagne et la mer m’est très difficile, car je ne peux vraiment pas imaginer ma vie sans ces deux environnements.
Votre (ou vos) spot(s) préféré(s) pour des vacances ?
La liste est longue! Ski à Portillo, au Chili, surf à Bali, voile en Grèce, randonnée dans les montagnes de l’Atlas, trekking au Tibet, safari à Sabi Sands, en Afrique du Sud, escalade sur la péninsule de Musandam, à Oman, bodysurf à Tamarama Beach, à Sydney, camping sur la côte ouest du Danemark, ski sur le domaine des Portes du Soleil, dans les Alpes, ou encore naviguer à travers les îles Whitsunday, en Australie…
Une ville où vous aimez retourner… et retourner encore ?
Paris, New York, Tokyo, Mexico, Le Cap, Barcelone, Bangkok et Hongkong.
« L’endroit le plus mémorable, loin de toute agitation est en Tasmanie »
Ce qui vous fait choisir une destination ?
Je me pose toujours trois questions: que vais-je faire une fois sur place ? Où vais-je manger et pourquoi ? Y a-t-il un endroit vraiment intéressant pour prolonger mon séjour ?
Un repas qui vous rappelle une destination en une seconde ?
Les huîtres et la presqu’île de Quiberon.
Un lieu pour se détendre ?
Herbert Ypma : Je pourrais en énumérer cinquante, mais l’endroit le plus mémorable, loin de toute agitation humaine, est la Bay of Fires, en Tasmanie.
« Anna et le roi » en Thaïlande
Si vous ne deviez retenir qu’un seul hôtel ?
Herbert Ypma : C’est difficile… probablement le Six Senses Laamu, aux Maldives.
Un livre de référence ?
The Innocents Abroad (Le Voyage des innocents, NDLR), de Mark Twain.
Une lecture de voyage ?
Cela dépend de l’endroit… Marrakech ou les Seigneurs de l’Atlas, de Jérôme et Jean Tharaud, au Maroc ; Anna et le Roi, de Margaret Landon, en Thaïlande ; Les oiseaux se cachent pour mourir, de Colleen McCullough, en Australie ; Ring of Fire, de Lawrence Blair, en Indonésie ; Le Vieil Homme et la Mer, à Cuba, Les Neiges du Kilimandjaro, au Kenya, d’Ernest Hemingway ; La Puissance de l’ange, de Bryce Courtenay, au Cap ; Leaving Las Vegas, de John O’Brien, aux États-Unis ; The Motorcycle Diaries, d’Ernesto « Che » Guevara, en Amérique du Sud ; Histoire véridique de la conquête de la Nouvelle-Espagne, de Bernal Díaz del Castillo, au Mexique…
« J’ai officiellement arrêté d’acheter des choses ! »
Le livre dont vous êtes le plus fier ?
Herbert Ypma : Il y en a deux… India Modern (1999) et Hip Hotels Atlas (2005).
Un repas dont vous avez encore le goût dans la bouche ?
Les pâtes au pesto de la Villa Ducale, à Taormine, en Sicile, avec des pistaches à la place des pignons de pin et des courgettes à la place du basilic. Je pourrais en manger au petit déjeuner.
Que rapportez-vous de vos voyages ?
Désormais, je ne rapporte que des souvenirs inscrits dans ma mémoire. Après avoir rempli deux entrepôts d’œufs d’autruche, de masques de danse, de meubles, d’objets religieux, de chandeliers d’église, de soieries, de couvertures maasaï, de peaux de léopard et de bronzes chinois… J’ai officiellement arrêté d’acheter « des choses » !
Un photographe qui vous a influencé ?
Il y en a plusieurs : Peter Beard, Herb Ritts, Richard Avedon, Irving Penn et, bien sûr, Henri Cartier-Bresson.
« Le musée Rodin et Picasso sont pour moi des musées essentiels »
Un musée que vous trouvez essentiel ?
Herbert Ypma : Il y en a deux… et ils se trouvent à Paris. Le musée Rodin et le musée Picasso. Pour moi, un musée doit offrir une expérience mémorable et
agréable, où vous ressentez également que vous avez vraiment appris quelque chose. J’adore le cadre, l’échelle et la sensibilité de ces deux-là. Et je pense vraiment que quelque chose d’aussi raffiné n’est possible que dans une ville comme Paris.
Un architecte que vous admirez ?
Je trouve l’œuvre de Luis Barragán vraiment passionnante. L’échelle, la simplicité et les couleurs extraordinaires de son travail m’ont tou- jours fait rêver de posséder, un jour, un ranch comme celui qu’il a dessiné pour lui, à Mexico.
Le bâtiment ou la maison de vos rêves ?
C’est facile: une maison coloniale avec de hauts plafonds, des parquets polis et une immense véranda donnant sur une plage offrant un spot de surf époustouflant.
« J’admire Christian Liaigre »
Un designer dont vous aimez le mobilier ?
J’ai toujours admiré le travail de Christian Liaigre et ce n’est pas parce que nous avons fait un livre ensemble. J’aime aussi les canapés recouverts de lin d’Axel Vervoordt. Et, récemment, je suis tombé sous le charme du design du Danois Oliver Gustav.
Qu’est-ce qui vous a donné envie d’éditer des livres ?
Herbert Ypma : Mon premier livre, India Modern, était totalement imprévu. À l’époque, j’étais rédacteur en chef d’Interior Architecture, un magazine que j’avais aussi fondé. Je me suis rendu en Inde pour un numéro spécial sur la relation entre l’histoire de l’Inde et son design contemporain. Or, j’ai récolté tellement d’informations que j’ai décidé d’en faire un livre. Vingt-sept ans plus tard, India Modern est toujours imprimé, toujours en vente, et c’est maintenant le livre illustré le plus vendu en Inde. En Angleterre, ils appelleraient cela « un heureux accident ».
« Six semaines à travers les îles grecques »
L’histoire la plus insolite que vous ayez vécue lors de la préparation d’un livre ?
Que je voyageais en Amérique du Sud, j’y ai rencontré un Français qui avait transformé un monastère situé sur une plage de pêcheurs, appelée Picinguaba, au Brésil, en un hôtel de charme très chic. Ce dernier avait réussi à mettre la main sur mon itinéraire de voyage et m’attendait à l’aéroport de São Paulo. Il m’a convaincu de changer mes plans, de monter dans sa voiture et de rouler avec lui pendant trois heures, à travers les montagnes, en direction de Picinguaba. C’est seulement une fois dans son véhicule, dans le noir, au milieu de nulle part, en compagnie de quelqu’un que je ne connaissais pas que j’ai réalisé à quel point c’était fou d’avoir accepté une telle proposition. Finalement, je suis resté trois jours dans son hôtel. C’était aussi beau et insolite que lui, et c’est resté l’une de mes découvertes préférées en Amérique du Sud.
Votre prochaine destination pour les vacances ?
Une escapade de six semaines à travers les îles grecques. Ce sera certainement intense, mais ce sera aussi fascinant. Je le fais pour le travail, mais malgré un programme chargé, je pense que ce seront aussi des vacances…