Dans un mélange improbable d’excentricité et de rigueur, le jeune Hugo Toro multiplie les projets prestigieux. De Londres à Paris en passant par un refuge d’altitude à Val-d’Isère ou une plage à Ramatuelle, on aime ses scénarios précis qui donnent naissance à des lieux sophistiqués et toujours pétris de poésie. IDEAT lui décerne l’Award du « Best interior designer» 2022.
Prime à l’imagination
Birkin et Gainsbourg à Londres, un certain Gigi dans le Var, à Paris et dans les Alpes… Fictifs ou réels, personnages et aventures sont toujours le point de départ des chantiers d’Hugo Toro : « Un bon projet, c’est comme un bon film, il émane d’un scénario intéressant », explique le jeune architecte de 33 ans au débit de mitraillette.
Pour concevoir les lieux livrés dernièrement (le Booking Office 1869, bar-restaurant de la gare londonienne Saint-Pancras, les restaurants Gigi pour le groupe Paris Society, des hôtels particuliers à Neuilly…), il a laissé filer son imagination. Son parcours ? Penninghen, d’où il est sorti major, puis un master à l’université des arts appliqués de Vienne, avant de fréquenter la Californie (UCLA). Il s’est associé un temps avec son condisciple Maxime Liautard, puis a fondé son agence.
À la croisée des époques
Sa sensibilité combine carambolages d’époques, attrait pour le nomadisme et sens du récit. « J’ai hérité de ma mère, qui est d’origine mexicaine, le goût des histoires et des couleurs. Enfant, j’ai voyagé en Italie, au Mexique, au Brésil… Puis j’ai poursuivi mes études en Autriche et aux États-Unis. Pour moi, rien n’est plus inspirant qu’un trajet en train pour dessiner et mettre en forme mes idées. »
Le voyage (dans l’espace et dans le temps) nourrit son vocabulaire : « Je réfléchis à la manière dont on vit dans un endroit aux différentes heures du jour et de la nuit. Comment un mange-debout sur lequel on travaille avec son ordinateur peut se transformer en table de fête. J’apporte une attention particulière aux circulations et aux espaces de transition entre les scènes vécues par les acteurs de mes scénarios : escaliers, couloirs… » Un terreau fertile pour des projets sur mesure aux problématiques différentes : « Mon style n’est pas minimaliste. Je préfère les solutions fortes et chaleureuses qui me permettent d’ancrer mes programmes. »
Si le terme « intemporel » est souvent galvaudé, Hugo Toro en fait son catéchisme : « On ne sait pas de quand datent les lieux que je crée. Ils incarnent de manière contemporaine des souvenirs subliminaux : je vais me baser sur un motif victorien, mais le travailler dans un esprit plus fauve, modéliser des céramiques en 3D pour en faire des moules et les dupliquer pour la façade d’un bar, vectoriser des jacquards pour les moderniser… J’ai conçu des lustres en billes de bois, inspirés des rideaux de cuisine en perles de mes grands-parents, à La Clusaz… », révèle-t-il. Rien n’est laissé au hasard et ses projets regorgent de détails. Nous sommes donc très impatients de découvrir sa nouvelle activité d’édition de mobilier, chez Kolkhoze.