Cinquante ans avant que Philippe Starck n’annonce l’ère du design dématérialisé, le prolifique Américain George Nelson a entrepris de faire disparaître le poids visuel des horloges classiques. Si, en Amérique, les lourdes horloges européennes à dorures et balancier étaient quasiment inconnues, la classe moyenne avait jeté son dévolu sur des modèles fantaisie : de la roue de charrette à aiguilles au grand disque rationaliste. Dans les fifties, le prolifique George Nelson a bouleversé cet ordre établi en créant une kyrielle de modèles pour la Howard Miller Company. À tel point qu’aujourd’hui, l’éditeur suisse Vitra réédite non seulement la Ball Clock mais aussi la Polygon, la Flock of Butterflies et la Wheel Clock, une étoile de cylindres de noyer prolongés de bouchons d’aluminium.
Une horloge intemporelle
Dès 1947, George Nelson casse la baraque en tenant compte de la leçon rationaliste du Style international. L’horloge qu’il signe reflète l’esprit de son temps : élégant, comme les lobbys des buildings de Mies van der Rohe, et étonnant, comme chez l’éditeur Knoll, tête de pont du mobilier contemporain. La première version de la Ball Clock suggère un rayonnement pacifique en pleine ère atomique. L’objet ne déparerait pas dans un décor de Star Trek… Il se composait à l’origine d’un disque central rouge qui dissimulait son mécanisme. Les douze rayons métalliques se terminaient par des boules rouges en bois. La ronde du temps s’égrenait avec une aiguille des heures surmontée d’une flèche et celle des minutes d’une d’ellipse. Selon la couleur du mur, la Ball Clock produit un effet graphique différent, projetant des ombres diaphanes suivant l’intensité de la lumière.
George Nelson a dématérialisé jusqu’à sa signature de la Ball Clock. Dans son livre The Design of Modern Design, cette horloge culte ne sort pas uniquement de ses schémas ni de ceux de son associé Irving Harper. Elle aurait été dessinée lors d’une soirée arrosée entre amis, dont le génial architecte Buckminster Fuller et le designer Isamu Noguchi. Au fond, qu’importe la signature, vu que la Ball Clock est in-tem-po-rel !
> Ball Clock de George Nelson (Vitra, 289 €).