Au Salon de Milan 1986, un éditeur français fait sensation. Son nom : Tribu. Fondé par Gérard Gayou, un entrepreneur toulousain, il détonne dans l’embryonnaire secteur du mobilier contemporain hexagonal. Sur son stand, des pièces signées Ettore Sottsass, Pierre Paulin, Verner Panton ou Martin Szekely… Tous ont répondu à l’appel car l’homme a développé autour de Toulouse un réseau de sous-traitants issus du secteur aéronautique. Ces artisans de pointe sont capables de proposer des technologies de fabrication uniques. En proposant cette approche innovante, où chaque objet représente un défi, Tribu a pu s’attacher les services de designers précurseurs, avides d’expérimentation.
Les pièces, surtout les plus volumineuses, sont fabriquées en très petites séries. La galerie 1043 a donc dû patiemment rassembler les pièces les plus significatives de l’éditeur pour constituer cet accrochage. Les chaises Miragio et Beribi d’Alessandro Mendini tirent ainsi profit d’une des premières machines à découpe laser pour dessiner une chaise taillée dans une feuille de métal. Martin Szekely produit, lui, une chaise en fibre de carbone, une première mondiale. Avec ses pieds fuselés, elle affiche toujours une élégance intemporelle. Un prototype de bibliothèque du même designer en aluminum est également exposé, une pièce unique puisque, pour le modèle de série, Tribu opta finalement pour du bois…
L’année suivante, Gérard Gayou se focalise sur le travail du verre et convoque deux designers japonais, Masaki Morita et Toshiyuki Kita, mais aussi Ettore Sottsass ou Michele De Lucchi. Néanmoins, cette deuxième collection conserve son approche à la fois technique et artisanale puisque Tribu choisit de travailler avec des maîtres verriers italiens. En 1988, le responsable du centre culturel français de Milan demande à Tribu de fabriquer le mobilier dessiné spécialement par Alessandro Mendini pour l’institut culturel. Dans cette collection baptisée « Légion Etrangère », le maestro célèbre sa vision de la France. Des pièces aujourd’hui sorties du Mobilier national et donc très rares.
Au début des années 1990, Tribu s’éteint avant que son rôle ne soit reconnu… Bien qu’il s’inscrive globalement dans l’esthétique des eighties, son mobilier en diffère par son refus de la couleur et sa totale confiance dans les designers. « Il n’y avait pas de briefing, pas de plans marketing », se souvient Martine Marescaux, son ancienne directrice artistique, aujourd’hui à la tête de l’agence Volcan Design. La somme réunie par les galeristes Didier Jean Anicet et Stéphanie Courbot constitue en tout cas un témoignage précieux d’une aventure humaine et créative unique.
« TRIBU, Une aventure française internationale » à la galerie A1043. 47, rue de Montmorency, 75003 Paris. Du mercredi au samedi, de 13 h 30 à 19 h, ou sur rendez-vous.
Exposition jusqu’au 21 juillet.