À Courmayeur, en Italie, quand les pistes se taisent et que la lumière décline derrière les crêtes du Mont‑Blanc, il se pourrait que l’on entre dans une nouvelle ère du refuge alpin. Les Belges de Maison Osaïn, qui se spécialisent dans l’acquisition de bâtisses typiques, au caractère fort, pour les transformer en refuges modernes grâce à une rénovation porteuse de sens, relèvent le défi : donner une vie contemporaine à un vieux chalet de montagne, tout en restant profondément enraciné dans son lieu.
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Réécrire le chalet, sans nostalgie
Traditionnellement, l’expression « chalet de montagne » évoque un refuge rustique à grand renfort de pans de bois sombre et de cheminée imposante. Maison Osaïn, fondé en 2022 par l’architecte Thomas Maria Verschuren et la designer Ann Butaye, ont choisi, eux, de s’écarter radicalement de cette vision. L’extérieur conserve les codes de la région (pierre d’ardoise, encadrements bois), mais l’intérieur joue la carte du retrait.
Maison Osaïn parle d’ailleurs de « chaleur retenue ». Les teintes neutres – lin, sable, gris pierre – dialoguent avec les volumes bruts. « La chaleur du bois rencontre la sincérité brute du béton, confie le duo. C’est un lieu qui accueille aussi bien la solitude que la convivialité. » La cohérence entre contexte, matériaux et agencement est la clé du projet. Le bois ancien de chêne, récupéré, le béton brut ou ciré, le microciment des sols… Tout cela compose un langage visuel de l’épure, mais chaud.
Le plan joue la compacité comme l’ouverture : trois niveaux de 50 mètres carrés chacun environ, reliés par une spirale centrale. Le bâtiment devient un objet sculpté et habité, plus qu’une accumulation de pièces qui s’enchaînent. Banquettes intégrées, absence de couloirs, fluidité des perspectives sont autant d’éléments qui permettent ouvrir davantage les espaces de ce chalet de montagne. L’espace respire, la décoration disparaît presque. Ce minimalisme chaleureux, qui évoque une sorte de wabi-sabi européen, replace l’humain au centre : « Nous concevons des intérieurs qui accueillent la vie, pas des vitrines figées », rappelle Ann Butaye.
Une maison pensée pour durer
Si House Montagna séduit par sa beauté brute, elle convainc surtout par sa cohérence. Maison Osaïn a fait appel à des artisans locaux, valorisé les circuits courts et une conception raisonnée. L’isolation naturelle, la récupération du bois ancien, le chauffage à énergie renouvelable : chaque détail traduit une approche consciente du design durable.
Cette cohérence s’étend à la façon d’habiter. Ce chalet de montagne invite à un rapport plus simple à la nature : grandes ouvertures sur les montagnes, continuité entre intérieur et extérieur, terrasses pensées comme extensions du paysage. House Montagna pose ici les bases d’une nouvelle architecture de montagne et marque un tournant dans le récit du chalet loin des clichés : moins décor-ski, plus cocon de vie. Car, oui, un design durable n’est pas qu’une affaire de matériaux. Comme le rappelle le duo : « Une maison durable est celle qui reste pertinente au fil du temps — non pas parce qu’elle suit la mode, mais parce qu’elle incarne un sens de l’équilibre et de la permanence. » Un design alpin contemporain, sensible et intemporel, qui pourrait bien redéfinir l’idée du chalet de montagne comme nos rêves d’altitude.
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