A l’occasion de son dernier atelier de pâtisserie – qui conviait plusieurs architectes de renom, en partenariat avec la marque d’électroménager ultra haut de gamme V-ZUG – IDEAT a pu échanger avec la star de la pâtisserie.
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Rencontre avec Cédric Grolet
IDEAT : Le monde entier vous connaît pour vos pâtisseries, mais on sait moins combien l’architecture vous passionne…
Cédric Grolet : J’en suis fan ! Depuis une dizaine d’années, je rénove à titre personnel des appartements, en les mettant le plus à nu possible, pour imaginer ensuite le lieu en fonction de l’environnement, de l’espace, du quartier… Je prends même beaucoup de plaisir à participer aux travaux !
« Tout est important »
Comment abordez-vous la conception de vos boutiques ?
Prendre le même architecte pour toutes mes adresses pouvait sembler plus facile. Mais j’ai préféré en choisir un par lieu, car cela m’apprend énormément. J’ai travaillé avec l’agence Cigüe pour la pâtisserie du Meurice, Maison Malapert pour la boutique d’Opéra et Rémi Teissier pour celle de l’hôtel The Berkeley, à Londres.
Et pour celle de l’hôtel Como Metropolitan, à Singapour, qui vient d’ouvrir ?
C’est Paola Navone qui a été choisie, et, dans ce cas, sur les conseils des propriétaires du groupe hôtelier avec qui elle a déjà travaillé.
Pourquoi vous adosser à des groupes hôteliers pour ouvrir vos boutiques ?
Ouvrir une pâtisserie au bout du monde est un exercice difficile. Le Groupe Cédric Grolet est indépendant, sans investisseur, et s’appuyer sur la structure d’un hôtel est rassurant pour assurer et maintenir la qualité.
Portez-vous une grande attention aux détails ?
Tout est important, pour moi comme pour les équipes. En boutique, les pâtissiers travaillent face au client, sur un plan de travail relevé à une hauteur de 1,1 m pour plus de confort. Les desserts sont placés sous cloches et pas dans des vitrines. Je veux que mes boutiques soient le plus épuré possible, un peu comme mes desserts. Le matériau, le toucher, la couleur définissent le lieu. Par exemple à Opéra, la partie boulangerie est aménagée avec un plan de travail en pierre volcanique, tandis que la pâtisserie qui lui fait face est traitée dans une ambiance plus pure, tout blanc et lisse.
Comment choisissez-vous les architectes qui travaillent avec vous ?
La difficulté est de trouver quelqu’un qui va avoir une approche design bien sûr, mais surtout pratique. Faire un bel espace est une chose, mais le faire fonctionner toute l’année, c’est autre chose.
« Le lieu doit sublimer le gâteau »
Vous investissez-vous personnellement dans ces projets ?
Je suis très impliqué dans la définition du concept, au moins autant, si ce n’est plus, que dans la carte, car pour cela j’ai mon chef exécutif. Au départ, je visite les chantiers une craie à la main, avec laquelle je dessine au sol les futurs espaces. Tant que je n’ai pas fait ça, je n’approuve rien. Je le valide aussi avec le chef exécutif et le chef qui travaillera dans la boutique pour l’aspect fonctionnel, les bons emplacements des divers espaces… J’apprends de boutique en boutique, et chaque projet permet d’améliorer le suivant.
Vos boutiques sont en quelque sorte un écrin pour vos créations ?
Un gâteau ne doit pas être « abimé » par le lieu, et le lieu doit sublimer le gâteau. Il y a une dimension à ne pas négliger : c’est l’image. C’est pourquoi, pendant la phase de chantier, j’ai pris l’habitude de m’asseoir dans la future boutique, de demander à mes pâtissiers de réaliser une des créations à la carte, pour me mettre à la place du client. Je pousse l’expérience jusqu’au bout en prenant des photos du gâteau ! Dans chaque boutique que j’ouvre, je reste entre 10 jours et deux semaines, j’observe l’articulation du lieu, comment les clients arrivent et repartent, comment ils circulent, consomment sur place…
Quelles sont les futures ouvertures ?
Après l’ouverture de l’hôtel Les Airelles de Courchevel, on ouvrira le Cédric Grolet Café, rue Danielle Casanova, à quelques pas de la boutique d’Opéra, à Paris. Ce lieu sera adapté à un plus large public, qui pourra emporter sa pâtisserie, la commander de chez soi, avec deux créations spéciales et un accord pâtisserie-café, avec l’aide d’une barista. Cette fois, c’est moi qui ai dessiné le concept !
Quel regard portez-vous sur votre parcours ?
Mon grand-père m’a toujours prévenu de la difficulté de ce métier, des conséquences sur la vie de famille… Que j’ai été meilleur pâtissier du monde n’est pas finalement le plus important. Ce qui compte, c’est que je puisse avoir une certaine influence sur mon secteur. J’en suis fier. Je le suis aussi que des étrangers qui visitent la France considèrent ce que je fais comme suffisamment important que cela leur donne envie de me rendre visite !