Sebastian, quelle image aviez-vous de Pedrali avant votre collaboration ?
Sebastian Herkner : Je connais la marque depuis quelques années et je suis sensible au fait qu’elle fabrique principalement dans ses propres usines du nord de l’Italie. Il est fondamental aujourd’hui de prendre en compte le lieu de production. La durabilité ne signifie pas seulement adopter des matériaux écologiques et hautement qualitatifs, cela implique également une responsabilité sociale.
Giuseppe, pourquoi avoir choisi de travailler avec Sebastian Herkner ?
Giuseppe Pedrali : Nous suivons Sebastian depuis de nombreuses années. Nous apprécions depuis toujours son parcours et les projets qu’il a réalisés. Il est certainement l’un des designers les plus représentatifs du moment, surtout en Allemagne. Son style se concentre sur l’élément décoratif. Cet aspect nous intéresse particulièrement, car nous sommes attirés par les designers capables d’exprimer au mieux leur créativité.
Comment vous êtes-vous rencontrés ?
S.H. : Nos chemins se sont croisés il y a environ cinq ans à l’occasion de différents salons. J’aime la marque pour son approche du contract ; elle prend le temps du développement et mise sur des produits fonctionnels.
G.P. : J’ai remarqué Sebastian Herkner dès sa première participation au SaloneSatellite de Milan. C’était il y a longtemps ! Nous nous sommes ensuite revus en 2015, année où Sebastian a pour la première fois visité notre site de production à Mornico al Serio, dans la province de Bergame. Nous avons entretenu notre relation à l’occasion de salons, puis nous nous sommes retrouvés à Maison & Objet en 2019, quand il a été élu « Designer de l’année ». Le moment était venu de travailler ensemble.
« Blume » signifie « fleur » en allemand
Quelle était l’idée de votre collaboration ?
S.H. : Je leur ai proposé de dessiner une chaise et, finalement, cela a donné une petite collection (chaises, chauffeuses et tables d’appoint, NDLR). Toute la conception repose sur un profilé en aluminium extrudé, présentant une série d’ondulations, à la manière d’une fleur. D’où le nom de cette collection, « Blume », qui signifie « fleur » en allemand. Le design est assez simple avec, d’une part, des éléments d’assise et de dossier ronds et doux et, d’autre part, le profil élégant et sophistiqué des pieds.
G.P. : Tout est né de l’idée de la fleur comme caractéristique principale du produit. Le but était de réaliser une chaise rembourrée. Sebastian nous a impressionnés avec ce détail iconique et décoratif du piétement qui donne une âme et du caractère à la collection.
Sebastian, quelle fut votre inspiration pour la conception de « Blume » ?
S.H. : Les chaises dotées d’une structure métallique sont toujours fabriquées avec des tubes standard de différentes couleurs. J’ai souhaité me concentrer sur cette question pour dessiner des pieds intéressants. J’ai créé ce relief ondulé qui permet un beau jeu d’ombre et de lumière. Diverses couleurs anodisées pour les pieds, combinées à une variété de tissus, apportent aux architectes des possibilités infinies d’utiliser la chaise, que ce soit à la maison ou au restaurant, dans les lieux de travail ou dans le hall d’un hôtel.
Comment avez-vous travaillé ensemble ?
S.H. : La collaboration a été très étroite et constructive dès le début du projet. Nous avons rencontré quelques difficultés concernant l’extrusion et les joints, puis les ingénieurs de Pedrali ont fait un excellent travail et trouvé des solutions intelligentes.
G.P. : Travailler avec Sebastian a été facile, car, dès le début, nous avons épousé sa proposition. Nous nous sommes vus au second semestre 2019 pour discuter des détails techniques, puis à nouveau en janvier pour valider le premier profilé en aluminium extrudé. Je me souviens encore de l’enthousiasme de Sebastian, qui, en prenant dans ses mains le profilé en forme de fleur avec ses sept pétales, a regardé à l’intérieur du trou et a remarqué, grâce à sa paroi intérieure à sept facettes, qu’il engendrait un beau jeu de lumière, comme s’il s’agissait d’un kaléidoscope.
Le designer a besoin de regarder et de manipuler l’objet
Malheureusement, la crise sanitaire est survenue, entraînant notamment l’annulation du Salon du meuble de Milan, où devait être présentée « Blume »…
G.P. : Le confinement nous a effectivement empêchés de voyager comme nous le souhaitions pendant la période d’urgence de la Covid-19. Cela ne nous a pas aidés, car nous avons dû suspendre les réunions, qui sont généralement de plus en plus fréquentes dans les mois qui précèdent la présentation du produit. Nous avons organisé de nombreux appels vidéo avec Sebastian et sommes restés en contact permanent. Mais ce n’était vraiment pas simple dans cette phase cruciale de tests et d’essais pendant laquelle le designer a besoin de regarder et de manipuler l’objet en direct, et non via un écran.
S.H. : C’est vrai, je n’ai pas pu me rendre à Milan pour voir le prototype, donc nous avons eu plusieurs appels Zoom pour finaliser le produit. Mais, finalement, je trouve que cela a été très efficace. C’est un outil formidable à utiliser dans l’avenir, après cette crise sanitaire. J’y aurai recours certainement plus souvent, pour des raisons de temps mais aussi d’écologie. Nous voulions effectivement que « Blume » soit lancée au Salon du meuble à Milan. Par conséquent, nous l’avons simplement présentée en ligne, via le live d’Instagram, et par mail aux clients. Les réactions ont été et sont encore vraiment très positives. D’ailleurs, si l’on peut en tirer un enseignement, je pense qu’il est réellement préférable de faire connaître les nouveautés une à une, sur plusieurs salons successifs et tout au long de l’année. Il est excessif de tout dévoiler lors d’une seule foire.