En fermant les yeux, à l’écoute du bruit des vagues de la mer toute proche, le visiteur peut essayer de visualiser les successions d’étés vécus dans cette somptueuse villa du début du XXe siècle. Nous sommes à Alassio, dans l’une de ces demeures qui ornent la côte ligure, entre Levante et Ponente. Toutes arborent des façades en stuc, des volets en bois blanchis à la chaux et cachent bien souvent des palmiers dans leur jardin donnant sur la mer.
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Un balcon sur la mer
Comme beaucoup d’autres, celle-ci a été, au fil du temps, divisée en appartements – six au total. « Ces maisons, typiques d’une solide architecture bourgeoise, ont été les précurseurs des résidences de vacances », expliquent les architectes Adelaide Testa et Andrea Marcante, créateurs du studio Marcante-Testa, à Turin.

Le duo a restauré l’un des appartements du deuxième étage de la villa, d’une superficie de 170 m², dans un esprit « pictural et fonctionnel », précisent-ils. Sur place, ce que l’on ressent, c’est d’abord l’atmosphère, accueillante et calme. Le projet a consisté en l’aménagement intérieur, mais aussi en d’importantes interventions structurelles, notamment pour relier le deuxième étage au grenier.
La rénovation a duré deux ans, de 2022 à 2024. Le cahier des charges des propriétaires – un couple du Piémont et leur fille de 9 ans – était clair : « Un grand salon, avec cuisine séparée mais visible depuis cette pièce, trois chambres, quatre salles de bains et une buanderie », explique Andrea Marcante.

Dans cette maison de vacances en bord de mer, l’architecture tisse un lien entre l’intérieur et l’extérieur. « La sensation d’absence de frontières entre le dedans et le dehors passe par les matériaux, comme le sol en terrazzo conçu sur mesure, qui fait directement référence aux belles demeures locales du début du XXe siècle. Il rappelle aussi le style hétéroclite des maisons de vacances ligures, où, par exemple, du papier peint floral des années 1950 peut être associé à une cuisine modulaire en stratifié et en carrelage, typique des années 1960. On retrouve aussi l’influence graphique des immeubles des années 1970 », explique Adelaide Testa.
Mer et mémoire
« Chaque fenêtre est encadrée de façon à renforcer la relation directe avec la mer, la transformant en un matériau faisant partie de l’esthétique de l’architecture intérieure. Ces rebords se prolongent dans l’espace pour créer des étagères et relier les fenêtres entre elles », ajoute Andrea Marcante.

Dans toute la maison, des meubles exceptionnels, conçus sur mesure par le studio Marcante-Testa ou achetés spécialement pour le projet, rappellent constamment d’autres époques, tout en restant innovants. Les palettes de couleurs pastel, à la fois délicates et audacieuses, évitent l’écueil du banal ou du répétitif.
« La couleur est au cœur de nos projets. Nous ne l’utilisons pas seulement pour la décoration. Elle met en valeur les vues sur la mer, oriente le regard, définit l’espace ou corrige les défauts structurels, comme les fenêtres qui atteignent presque le plafond et qui retrouvent leur équilibre grâce à une bande de couleur appliquée autour. Autant les matériaux racontent l’histoire du lieu, autant ils résolvent aussi des problèmes structurels, comme le pilier métallique circulaire, près de l’escalier, que nous avons recouvert d’osier », explique Adelaide Testa.

Pour Andrea Marcante, « il ne s’agit pas seulement de décoration ou de combinaisons. Nos palettes suivent une logique précise, donnant au choix des couleurs l’importance du matériau lui-même ». Le résultat, séduisant, n’évoque aucune période en particulier. Ce qui convient parfaitement à l’esprit dans lequel travaille le duo. « Ce projet recherche un équilibre délicat entre la nature et l’artifice, les éléments du passé et les langages contemporains », concluent les architectes.
De fait, l’appartement revisité leur évoque le souvenir de vacances passées en Ligurie dans les années 1960 et 1970, à l’instar de nombreux Turinois et Milanais de cette époque.
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