A 86 ans, Bodil Kjaer signe son grand retour au salon de Milan grâce à 25 rééditions de prestigieuses maisons danoises. De Fritz Hansen à Carl Hansen & Son, tous ont succombé aux meubles et objets de décoration de leur compatriote, à découvrir jusqu’à la fin de la semaine dans l’enceinte baroque du Palazzo Litta Cultura.
Présentées à l’occasion du salon du mobilier, toutes les pièces sont issues de sa série « Elements of Architecture », dessinée entre 1955 et 1963. A cette époque, celle qui n’est encore qu’une jeune architecte décide de mettre à profit sa formation au Royal College of Arts de Londres pour aménager ses propres bâtiments au style international résolument fonctionnel et dépouillé.
Pas satisfaite du mobilier traditionnel disponible sur le marché, elle commence à dessiner des plans de travail et des rangements flexibles pour les universités qu’elle conçoit, notamment l’Institut de Technologie du Massachusetts, où elle signe en 1959 une des pièces phares de sa carrière. En combinant la finesse de l’acier à une épaisseur de frêne rythmée par quatre tiroirs, son bureau devient alors l’incarnation même de la modernité, à la vie comme à l’écran, en s’affichant fièrement aux cotés de James Bond dans Bons Baisers de Russie et On ne vit que deux fois.
Alors que Marcel Breueur choisit 28 de ses canapés pour un de ses immeubles new-yorkais, ses créations, d’abord développées en éditions limitées, sont finalement distribuées à grande échelle pour répondre à leurs succès. Mais cette production, destinée à toute l’Europe et aux Etats-Unis, cesse dès le milieu des années 1970 en raison de la faillite des deux fabricants impliqués. Aujourd’hui, ce sont sept éditeurs danois qui se sont répartis l’héritage de la designer.
Entre le minimalisme de sa table Cross-Plex et un salon en bois réédité par Fritz Hansen, on retrouve ainsi ses incontournables vases Crosses. Des soliflores aux tailles variées, à assembler librement pour composer des nappes végétales en rupture avec l’esthétique artificielle et massive des bouquets. Cette géométrie aussi sensible que rationnelle incarne parfaitement l’esprit de son auteur.