Il ne reste rien de l’ancienne décoration de ce duplex, installé tout en haut d’un immeuble du début du XXe siècle. Et aucun élément remarquable n’a pu être conservé. Si la réunion d’anciennes chambres de service a permis de créer le niveau supérieur, l’inférieur ne comportait que des cheminées banales et un parquet droit lambda… Au moins, cette surface présentait l’avantage d’offrir une page blanche aux architectes d’intérieur du Studio Klein : David Duron et Stephane Satorra.
Tous les deux formés à L’Institut supérieur des arts appliqués (LISAA), ils travaillent ensemble depuis plus de vingt ans et ont rebaptisé leur agence, Studio Klein, en 2018, quand ils ont déménagé leurs bureaux dans la cité Yves-Klein, à Paris (XVIIIe), dans le bas de Montmartre, baptisée ainsi parce que le peintre y avait séjourné quelques mois.
Esthétique seventies
Leur mission : aménager un appartement moderne pour une famille avec trois enfants dont les deux parents collectionnent du design vintage assez pop, du street-art et de l’art contemporain. « L’appartement est un bon mix entre une esthétique 70’s forte et des codes modernes d’utilisation, analyse David Duron. Il n’était pas question de singer l’architecture de l’époque. L’organisation spatiale reste assez traditionnelle, avec une cuisine fermée, par exemple, mais pas de podium ni de moquette. Les meubles en revanche, toujours extrêmement actuels et confortables, sont devenus des classiques incontournables. »
Résultat : l’appartement compte une suite parentale et une chambre d’enfant au premier niveau, à côté des pièces de vie, et deux chambres supplémentaires à l’étage.
L’architecture de Studio Klein privilégie les perspectives, la circulation de la lumière et la vue, induits par le « plan de fonctionnement » de l’appartement. « Nous voulions donner à nos clients la sensation de vivre dans un 200 m2 alors qu’il n’en compte que 140 », explique David Duron. Ainsi, la cuisine est semi-ouverte, à la fois en retrait et en contact avec les autres pièces communes. « D’ailleurs nos clients demandent de moins en moins de cuisines totalement ouvertes sur le salon », observe-t-il.
Les murs restés blancs mettent en valeur les œuvres. Le parquet en chêne à bâton rompu teint en noir vient en contrepoint. La couleur surgit sur les coussins jaunes des chaises Tulip, d’Eero Saarinen (Knoll), sur l’abat-jour orange de la lampe Snoopy, d’Achille et Pier Giacomo Castiglioni (Flos), ou sur la tapisserie vert pomme du fauteuil Culbuto, dessiné par Marc Held en 1967.
Au plastique pop d’hier répondent les matières plus naturelles et sophistiquées d’aujourd’hui. Des placages de chêne habillent certains murs de la cuisine, mais aussi dans l’entrée et autour de l’escalier iconique de Roger Tallon. Les portes des meubles de cuisine sont métalliques, dans une nuance dorée-cuivrée. De leur côté, la cheminée a reçu un manteau en marbre noir du Zimbabwe et la table du petit déjeuner, un plan en marbre à veines d’or.
Habiller les murs
Les architectes d’intérieur ont « sculpté » les pièces de courbes douces pour répondre au design tout en rondeurs, « quasi végétal », des meubles chinés spécialement pour l’appartement : la trémie de l’escalier a été redessinée pour former un rond parfait ; la bibliothèque sur mesure voit ses rayonnages partir en vagues symétriques de chaque côté de la cheminée ; même les placards en partie basse prennent une forme organique.
Enfin, de grands radiateurs en colonnes annelées, tels des totems, affichent une laque noire ou blanche, leur donnant l’allure d’œuvres d’art. « Ici, l’architecture et l’architecture intérieure accompagnent le thème donné au départ. Tout a été chiné et dessiné spécialement pour cet endroit. Au fond, ce qui nous importe, souligne David Duron, c’est que chaque intérieur ressemble à son propriétaire. Ce couple savait parfaitement ce qu’il voulait. C’était d’autant plus agréable. »