Considéré comme la tête de file de l’architecture portugaise, Alvaro Siza Vieira est né en 1933 à Matosinhos dans la banlieue de Porto. Il étudie à l’Ecole supérieure des beaux-arts de Porto de 1949 à 1955, où il est porté par une volonté de créer un dialogue critique entre architecture contemporaine et tradition portugaise. Il porte toujours une grande attention aux détails de finition, intérieurs comme extérieurs, ce qui lui vaut d’être comparé à Mies Van Der Rohe. La richesse de son vocabulaire architectural recèle néanmoins des récurrences qui rendent son travail reconnaissable entre tous. Voici ses 5 bâtiments majeurs.
A l’Ecole d’architecture de Porto, des plinthe démesurées
A l’école d’architecture de Porto (1987), Alvaro Siza pioche dans l’architecture traditionnelle de la ville et sa sensibilité pour la culture et l’histoire de son pays. Les maisons populaires enduites de plâtre blanc sont pour lui une inépuisable source d’inspiration. Depuis l’autre rive du Douro, on peut voir au loin l’élévation de l’école qui fait référence aux maisons situées en contrebas. Déambuler à l’intérieur de l’école d’architecture, c’est effectuer une promenade à travers l’identité architecturale d’Alvaro Siza. L’une des caractéristique récurrente de son travail est l’usage de la plinthe, ici haute de plus d’un mètre. Autour des bâtiments, la plinthe grise et continue contraste avec les menuiseries asymétriques. À l’intérieur, elle contribue à créer une continuité entre le sol et le mur pour amener à la dissolution des lignes et aux jeux de reflets dans le marbre.
> Via Panorâmica Edgar Cardoso 215, 4150-564 Porto, Portugal.
2/ Au musée Serralves, multiplication des points de vue
Le Musée d’art contemporain ou Musée Serralves de Porto (1999) est l’une des principales institutions consacrées à l’art contemporain à Porto. Au centre d’un parc de 18 hectares, le bâtiment se dissimule dans la végétation et donne à voir aux visiteurs des points de vue spectaculaires sur le Domaine de Serralves. Siza considère qu’il est toujours nécessaire de respecter le contexte dans lequel il implante ses architectures, qu’il s’agisse d’une ville, d’un quartier ou d’un parc. Par le biais du dessin, Alvaro Siza commence toujours par esquisser des principes d’ensemble, reflets de sa sensibilité personnelle, de ses observations et de l’histoire du site. A l’intérieur du musée, les formes des menuiseries sont étendues dans l’horizontalité ou dans la verticalité pour mettre en valeur les dimensions des espaces et laisser l’opportunité au visiteur de devenir un spectateur.
> R. Dom João de Castro 210, 4150-417 Porto, Portugal.
3/ A l’église Santa Maria, de la topographie au bâti
L’Église Santa Maria à Canaveses (1997) est considérée comme l’une des architectures religieuses les plus remarquables du XXe siècle. L’église se veut unique par son inscription méticuleuse dans la topographie et son respect du site. En s’appuyant sur la pente naturelle du terrain, Alvaro Siza joue avec les niveaux pour donner à voir un point de vue toujours unique sur l’extérieur. Longue de 30 m et large de 16,5 m, elle fait l’objet d’un travail très précis des proportions. La verticalité de la façade principale et sa porte d’entrée imposante donnent la sensation d’élévation vers le ciel. Alvaro Siza bannit le décor des façades gothiques pour laisser place à la sobriété des formes architecturales contemporaines. A l’intérieur comme à l’extérieur, le béton blanchi à la chaux accentue l’atmosphère spirituelle et paisible. Par la blancheur de ses façades et son étonnant jeu de niveaux, Santa Maria devient un point de repère dans son paysage vallonné.
> Av. Gago Coutinho, 4630-206 Marco de Canaveses, Portugal.
4/ Au Pavillon du Portugal, le béton spectaculaire
Le Pavillon du Portugal élevé à Lisbonne en 1988 est une étape marquante dans l’histoire de l’architecture contemporaine portugaise. Construit pour représenter le pays pour l’Exposition universelle de 1998, ce bâtiment est une prouesse technique d’ingénierie. Avec sa feuille de papier posée entre deux briques, il utilise le béton de façon phénoménale. Cette voile inspirée des des caravelles portugaises des XVe et XVIe siècle semble être suspendue dans les airs, ses 1 400 tonnes défiant les lois de la gravité. L’architecte confronte l’horizontalité de la voile à la verticalité des bâtiments latéraux. Toute la délicatesse du bâti tient à la jonction entre ces trois éléments. Légèrement détachée du mur, la voile laisse apparaître les câbles métalliques qui la transpercent et la soutiennent. Cette esplanade fait aujourd’hui office de lieu de rencontre où l’on se sent abrité et protégé, en hiver comme en été.
> 1990-221 Lisbon, Portugal.
A Saint-Jacques-de-la-Lande, des matériaux sublimés par la lumière
Petit détour en France pour terminer avec l’église Saint-Jacques de la Lande (2018). Depuis 1971, aucune église n’avait été construite en Bretagne. Au centre d’un quartier conçu par Jean-Pierre Pranlas-Descours, celle-ci exalte la modestie d’Alvaro Siza. Ce bâtiment prend place sur une parcelle de 400 m2. À l’intérieur, c’est une succession de surprises qui amène le croyant comme le visiteur de passage à monter les escaliers pour accéder au choeur de l’église. Selon Alvaro Siza, la poésie qui émane de ses espaces naît de sa fonctionnalité. La lumière et la liaison des matériaux jouent un grand rôle dans les créations d’Alvaro Siza. À l’intérieur de l’église de Saint-Jacques-de-la Lande, la lumière naturelle est soigneusement réfléchie pour sublimer les volumes et les liaisons du marbre ou du granit en joints creux, ainsi que l’usage du zinc et du bois. L’éclairage zénithal fait rebondir la lumière sur les murs blancs pour immerger dans l’atmosphère spirituelle chère à son architecte.
> Rue du Haut Bois, 35136 Saint-Jacques-de-la-Lande, France.
« Toute l’œuvre de l’architecte porte l’empreinte d’une dualité : d’un côté, un travail plastique qui joue à bousculer les angles droits, à pousser les masses au déséquilibre ; de l’autre, la rigueur, une totale économie de vocabulaire et de moyen. […] De cette tension permanente naît une qualité rare dans l’architecture contemporaine : l’émotion. » (Copans & Neumann, 1999)