Couronné d’une nouvelle verrière, le numéro 175 du boulevard Haussmann rouvre ses portes en majesté. Après quatre années d’une lourde restructuration, l’immeuble de 1863 et son voisin de 1920 accueillent depuis cette semaine les 400 collaborateurs de la banque Lazard. Grâce à l’intervention de PCA-Stream, l’agence menée par Philippe Chiambaretta, les deux bâtis concilient désormais patrimoine et modernité sous des écailles de verre qui bousculent élégamment le contexte historique du VIIIe arrondissement.
Comme un signal dans le paysage urbain, « la verrière apporte à l’ensemble une nouvelle identité architecturale, forte et contemporaine, mais sans gesticulation » selon Philippe Chiambaretta. L’architecte a souhaité redonner de la lisibilité à l’immeuble haussmannien bénéficiant d’une rare situation en proue. Composée d’un premier étage en pierre, puis de deux niveaux de salles de réunion dissimulés par le verre, cette surélévation gomme également le décroché disgracieux entre les deux bâtiments du siège, déjà fusionnés au cours des années 90 pour une précédente entreprise, mais souffrant d’un manque de cohérence.
Un argument pour attirer de nouveaux talents
Déplacée à la pointe du complexe de 12 000 m2, la nouvelle entrée gagne encore en noblesse grâce à un immense lustre conçu en dialogue avec Agent M. Du travail de la lumière au choix des matériaux, en passant par celui du mobilier, l’aménagement évoque plus les grands hôtels que l’univers des bureaux. Ici, le prestige se doit d’être à la mesure des clients de la banque Lazard, invités à rejoindre des salons privatifs, feutrés et intimistes. Ainsi que des espaces dînatoires, où le service sous cloche et les gants blancs sont de rigueur. Presque aussi choyés, les employés profitent quant à eux d’un environnement centré sur le bien-être au quotidien. Une valeur essentielle, à l’heure où la qualité des bureaux devient un argument notable pour attirer de nouveaux talents.
Après avoir pensé les bureaux de Facebook, Blablacar ou Chanel, Philippe Chiambaretta décline à nouveau son expertise du secteur tertiaire. Exit les restaurants d’entreprise en sous-sol, les open-space ou, à contrario, les plateaux sur-cloisonnés : ici, l’accent est mis sur la fluidité, la flexibilité et de nombreux espaces de rencontre. En témoigne « la place du village », un grand salon installé dans le patio central. Donnant sur la rue, le restaurant s’ouvre, lui, aux visiteurs extérieurs en dehors du déjeuner. Une particularité rare dans des immeubles de bureaux qui vivent traditionnellement en autarcie. En dépit des besoins de confidentialité inhérents au siège d’une banque, le projet s’interdit de rogner sur les envies d’échanges et de sociabilité des employés.
Pour l’aménagement des bureaux, PCA-Stream a notamment collaborer avec le RF Studio de Ramy Fischler. Alors qu’il fignole la future brasserie de la tour Eiffel, le designer belge révèle ici une « volonté d’apaiser, d’adoucir la culture de la banque d’affaires, très masculine et institutionnelle. […] Nous avons fais un effort sur le confort, avec des codes esthétiques proches de l’univers domestique. Car la simple présence d’un salon peut changer totalement la perception d’un rendez-vous. » De petits boudoirs côtoient ou introduisent donc les salles de réunion, agrémentées de luminaires, de tables et de canapés sur mesure ou piochés parmi les collections « contract » du créateur.
Au sol, aux murs et au plafond, des bandes de couleurs, souvent matérialisées par du bois, courent d’un endroit à l’autre pour rompre la monotonie des couloirs et atténuer la distinction entre les circulations, les pièces closes et les espaces dédiés aux postes de travail. Partiellement délimités par des rangements, ces derniers réunissent quatre à six personnes dans un cadre au summum de l’ergonomie. Tout le monde a droit a son bureau motorisé et escamotable, de l’associé au dernier stagiaire arrivé. Munis d’un ordinateur portable, tous peuvent également travailler sur la terrasse végétalisée du dernier étage. A condition de ne pas être distraits par la vue !