Si la tapisserie signe son grand retour dans les intérieurs, c’est grâce au travail de fond de galeristes, de décorateurs ou d’institutions comme la Cité internationale de la tapisserie d’Aubusson (Creuse). A la fois lieu d’exposition et d’émulation pour les artisans lissiers et les créateurs, la Cité propose jusqu’au 21 septembre au centre Jean-Lurçat une retrospective célébrant les 10 ans de son « Fonds pour la création de tapisserie contemporaine », lancé dans la foulée de l’inscription par l’Unesco en 2009, de cet artisanat d’art au Patrimoine culturel immatériel de l’humanité.
Comme un pied-de-nez à l’image vieillotte que véhiculait ce savoir-faire ancestral, le premier appel à projet est remporté par Nicolas Buffe et sa « Peau de licorne ». L’artiste contemporain installé à Tokyo s’est inspiré des mangas pour imaginer une spectaculaire descente de lit en noir et blanc posée au sol, au cœur de la salle d’exposition du centre Jean-Lurçat. Autour de cette œuvre fondatrice, on retrouve les tapisseries d’artistes comme Clément Cogitore qui a reproduit la photo d’une scène d’émeute sur la place Tahrir lors de la révolution égyptienne en 2011. Au centre, un homme à cheval ressemblant à un cavalier de l’apocalypse a enflammé à l’époque les réseaux sociaux. Sans doute l’œuvre la plus puissante de l’exposition…
Dans un registre plus léger, mais là aussi dans un jeu de reproduction, on retrouve l’incroyable trompe-l’œil de Marie Sirgue, qui a détourné en tapisserie une bâche de plastique bleu, dont le luxe de détails dans les plis et les ombres est réellement trompeuse. Elle voisine avec la reproduction d’un cordage XXL par Mathieu Mercier. Deux œuvres qui montrent la qualité technique de la tapisserie sans que ce soit jamais démonstratif.
La Cité a également collaboré avec des designers comme Bina Baitel et son micro-paysage coloré constitué de deux tables basses reliées par un lac tissé. La visite est aussi l’occasion de découvrir le magistral ensemble « The Great lady », sept pièces de mobilier intégrant une tapisserie d’Aubusson éditées par le studio Ymer&Malta. Cabinet ou banc de Benjamin Graindorge, console de Kenza Drancourt, banc en chêne brûlé de Ferreol Babin ou banc intégralement tissé de Sebastian Bergne… Cette collection oscille entre virtuosité, classicisme et – parfois – kitsch assumé. Un ensemble hétéroclite qui reflète la vitalité de la création contemporaine et ouvre de réjouissantes perspectives pour la tapisserie dans les années à venir !
> 10 ans de création contemporain. Au Centre culturel et artistique Jean-Lurçat. 16, avenue des Lissiers, 23200 Aubusson. Jusqu’au 21 septembre.