Living Divani est une société familiale. Hasard ou résistance ?
Carola Bestetti : Le fait d’être une entreprise familiale n’est pas un détail. Mais la médaille a son revers. D’un côté, nous avons l’avantage de gérer nous-mêmes ce que nos parents nous ont transmis. Mais de l’autre, c’est parfois plus difficile d’avoir à créer et à diriger en même temps. En tous cas, dans l’organigramme de Living Divani, vous ne verrez que des postes et des gens choisis par nous, pour que nous conduisions chaque étape du développement de nos gammes. Dans notre marché de niche, nous restons libres de discuter entre nous, sans la pression du résultat à court terme.
Qu’est-ce qui a le plus changé depuis votre arrivée en 2004 ?
Au début, j’ai étudié de près la production, le marketing et les finances. Et étant chargée, justement, du développement des produits, j’ai misé sur Internet et les réseaux sociaux. Ce n’était pas si difficile, c’était encore tout récent. Pour mes parents, toujours actifs dans la société, appréhender tout cela était un défi, mais ils m’ont fait confiance. J’ai également initié de nouvelles collaborations avec des designers.
Et des collaborations qui durent… Un hasard ou un choix ?
C’est voulu. J’ai toujours cherché des regards neufs pour penser et monter des projets différents. Quand, par exemple, j’ai rencontré Junya Ishigami, je suis tombée amoureuse de ce qu’il avait présenté à la Triennale de Milan. J’ai ensuite accompagné son travail pour que sa créativité respecte la philosophie développée par Living Divani.
Que vous apporte le duo Junpei & Iori Tamaki ?
Junpei est japonais, Iori est taïwanaise ; leurs différentes approches nous enrichissent de perceptions et de sensibilités diverses.
Quel impact a eu pour vous la globalisation du marché ?
Quand nous imaginons un produit, ce n’est pas pour telle ou telle cible, c’est pour une diffusion mondiale. Il doit donc être à facettes multiples. Qu’ils viennent de Chine, du Brésil ou d’Europe, nos clients forment un même groupe.
Quel est l’aspect le plus délicat de votre rôle ?
Le choix des produits à développer. Je ne me fie pas qu’à mon goût personnel ; j’en discute avec Piero Lissoni, notre directeur artistique. Tout se fait avec lui. Nous échangeons également avec mes parents et le département commercial. Le plus beau projet, c’est celui qui est fonctionnel et qui se vend. Les gens doivent comprendre nos choix. Je suis toujours à la fois anxieuse et excitée d’entendre les premières réactions de nos équipes, puis celles du marché. Le défi, pour moi, est de ce côté-là.
Comment travaillez-vous avec Piero Lissoni, le D.A. de Living Divani ?
Piero a commencé à travailler avec mes parents il y a trente ans. S’il n’était pas encore l’homme que vous connaissez aujourd’hui, il a refaçonné la société qui lui a aussi donné la possibilité de réaliser beaucoup de choses. Depuis, il s’est fait un nom que tous réclament. Nous avons eu beaucoup de chance de le rencontrer tôt ! (Rires.) D’aucuns trouvent que ses créations se ressemblent, mais vous ne pouvez pas planter un pommier et récolter des poires ! (Rires.) Ce serait comme de demander à Picasso de faire un Tintoret. Piero nous connaît bien et notre ADN ne se dilue pas dans son aura.
Préférez-vous décliner des gammes existantes ou multiplier les nouveautés ?
Cela dépend. Il existe tellement de produits qu’il vaut mieux développer certaines de nos collections. Si j’aime proposer des articles inédits, il sera bientôt plus compliqué de présenter sans cesse de nouveaux designers. Question de cohérence, parce que le marché ne peut pas non plus absorber autant de produits.
La presse veut toujours des nouveautés. Vous y pensez ?
Oui, mais à force d’être régulièrement sollicités, les consommateurs sont blasés. Pourquoi remplacer une référence qui n’a qu’un an ? Notre sofa Extrasoft de 2008 par exemple marche toujours, et une fois qu’il est « revampé » avec un tissu différent, les gens le croient nouveau. Un Salon de Milan tous les deux ans, ce serait bien !
Quel est le plus grand marché de Living Divani pour l’export ?
L’Europe avec l’Allemagne, la France et la Belgique. L’Asie, avec la Chine, est le marché émergent le plus important. Nous nous développons également en Amérique du Nord.
L’élégance silencieuse de Living Divani, la revendiquez-vous ?
Nous la revendiquons. Le calme et le silence, les choses élégantes participent de ce qui dure. Et cela convient à toutes sortes d’environnements, pour tout le monde, partout. Si vous croyez en ce que vous faites, les pieds sur terre, vous n’avez pas besoin d’en rajouter.