Le 28 juin dernier était inaugurée la MÉCA, acronyme de Maison de l’économie créative et de la culture de la région Nouvelle-Aquitaine. Un chantier mené tambour battant en trente mois pour un projet phare de la métropole qui aura coûté 60 millions d’euros. Tout le monde avait fait le déplacement, y compris les parents de Bjarke Ingels (BIG), starchitecte aux manettes de cette nouvelle icône bordelaise. Le quadra danois, qu’on ne présente plus, a découvert Bordeaux en 2010, lors de l’exposition « Yes Is More », que le centre d’architecture Arc en rêve lui consacrait.
Pour le concours attribuant la construction de la MÉCA, organisé en 2011, pas moins de 152 candidatures avaient été déposées, parmi lesquelles celles de Jean Nouvel, Zaha Hadid ou encore Sanaa. Associé pour l’occasion à l’agence parisienne Freaks Architecture, Bjarke Ingels a finalement remporté la mise en avril 2012. En choisissant BIG, la ville en a eu pour son argent. Il est dommage de n’avoir pas saisi l’opportunité du projet pour s’emparer des abattoirs à l’abandon, voisins du site d’implantation de la MÉCA. Mais Bordeaux rêvait de son équipement culturel XXL et d’un nouvel emblème. Quelque peu massive, la silhouette du bâtiment s’affirme désormais fièrement dans le quartier Euratlantique, à quelques minutes de la gare Saint-Jean. Sa dimension urbaine n’en demeure pas moins intéressante. Opérant un trait d’union entre la ville et le fleuve, pensé comme « un totem culturel », l’édifice s’installe dans une position en surplomb qui donne le ton.
Conçue comme une boucle, la MÉCA est un lieu à arpenter, connecté à la cité. Les rampes et les gradins sont ouverts et accessibles à tous, de jour comme de nuit. Elle bénéficie également de deux entrées, multipliant les possibilités. « Dans notre architecture, explique Bjarke Ingels, nous cherchons toujours de nouvelles manières de susciter l’envie de visiter nos constructions – de les traverser dans tous les sens et d’en faire le tour – et nous nous efforçons de procurer davantage de place au plaisir et aux rencontres. En procédant de la sorte, nous réimaginons la façon dont nos bâtiments sont profilés et formés, la manière qu’ont les espaces de s’interconnecter, comment ils peuvent se combiner, comment nous pouvons tirer parti de l’écrin que constitue la ville. Nous le faisons du mieux possible ! »
Monumental de près, visible de loin : le bâtiment remplit parfaitement sa mission. À l’intérieur s’enchaînent les plateaux flexibles qu’aucune cimaise ne vient perturber. Le lieu est résolument modulable, ouvert à l’expérimentation et à l’imagination. Quant à l’enveloppe, elle s’est matérialisée dans la fameuse pierre calcaire de Bordeaux, une référence évidente dans la région utilisée ici sur tous les flancs, qui est venue recouvrir la structure en béton. L’aspect brut est assumé tout comme l’absence de finitions ; les amateurs d’espaces sophistiqués n’y trouveront pas leur compte. Mais la véritable audace de la MÉCA est à chercher ailleurs que dans son architecture, somme toute assez sage.
L’ambition majeure est d’avoir réuni trois programmes culturels distincts sous un même toit. Le bâtiment de 12 600 m2 regroupe en effet deux agences, l’ALCA (livre, cinéma, audiovisuel) et l’OARA (spectacle vivant) ainsi que le FRAC Nouvelle-Aquitaine : autant de possibilités de véhiculer le dynamisme créatif de la région. Car l’idée maîtresse de cet attelage est moins la fusion que le rapprochement. Objectif ? Opérer des synergies au sein d’une ruche artistique commune. Et affirmer enfin Bordeaux comme une destination culturelle à part entière. Comme ses voisines européennes, Bilbao ou Barcelone, que la capitale girondine a toujours regardées avec envie.