En novembre 2017, IDEAT consacrait la couverture de son onzième hors-série architecture au visage de la future tour Montparnasse. La rénovation de cet icône mal aimée venait de faire l’objet d’un concours international d’architecture remporté par Nouvelle AOM, un groupement de trois agences françaises réunies pour cette occasion : Franklin Azzi, Chartier Dalix et Hardel-Le Bihan. Haute de 210 mètres, cette tour reste un symbole patrimonial de la capitale, malgré les critiques qu’elle subit depuis son inauguration en 1973. Objectif de ce lifting à 300 millions d’euros ? Rien de moins que la réconciliation avec les Parisiens…
L’enquête publique a pris fin le 21 juin dernier. Même si les polémiques ne sont pas près de s’éteindre, le projet de rénovation est désormais sur les rails avec un achèvement prévu en 2024. Mais s’il est aujourd’hui nécessaire de repenser cette tour obsolète, il en va de même pour l’ensemble du quartier. Manque de lisibilité de l’espace, de continuité piétonne, d’attractivité des commerces, absence de connexion avec la ville : la description est peu flatteuse. Le site Maine-Montparnasse symbolise à lui seul tous les maux de l’urbanisme sur dalle. Les usagers et leur confort semblent tout bonnement avoir été oubliés ! Il était donc urgent de reconnecter, d’apaiser, de végétaliser et d’adapter aux usages contemporains cette enclave de 9 hectares aussi difficile à appréhender qu’à arpenter alors même qu’elle bénéficie d’une position stratégique dans la capitale.
Pour panser ces plaies, le réaménagement du site Maine-Montparnasse a, comme la tour, fait l’objet d’une consultation internationale d’urbanisme lancée en 2018. On peut s’étonner que les deux concours aient été organisés de façon distincte alors que l’objectif affiché est celui d’une vision urbaine globale. En réponse, la Ville de Paris invoque l’importance de l’enjeu, le calendrier et la multiplicité des maîtres d’ouvrage, qui auraient rendu l’entreprise immensément complexe.
Une forêt urbaine et un grand espace public
C’est la proposition de Rogers Stirk Harbour + Partners, associés pour l’occasion à Lina Ghotmeh (lire notre grand entretien dans le hors-série Architecture #14), qui a été retenue début juillet. Cet été, les quatre projets finalistes ont fait l’objet d’une exposition au Pavillon de l’Arsenal, à Paris. « Nous avons choisi ce projet à l’unanimité, car il présentait la forme urbaine la plus écologique, avec une réutilisation des structures existantes du centre commercial, la plantation d’une forêt urbaine et un grand espace public très clair, de la rue de Rennes à la gare », résume Jean-Louis Missika, adjoint à la maire de Paris chargé de l’urbanisme, de l’architecture, des projets du Grand Paris, du développement économique et de l’attractivité.
Baptisé « Lignes de désir », le projet gagnant réfute l’idée de table rase. Son point de départ ? L’étude des flux. Comprendre la façon dont les gens se déplacent dans le site Maine-Montparnasse afin de recréer des axes naturels. « Notre projet, explique l’équipe lauréate, a pour objectif de simplifier la lecture du site, avec ses acteurs et ses enjeux, sans rien enlever à sa richesse, ni à sa complexité ; donner une vision transformatrice d’ensemble en insufflant à ce quartier pivot de Paris plus de vie et de dynamisme. Nous souhaitons célébrer les qualités intrinsèques du lieu, sa vocation culturelle et de quartier de gare, tout en transformant radicalement son image : un quartier plus vivant, plus accessible et plus durable. »
Dans l’équipe, on retrouve le paysagiste Michel Desvigne, chargé de la végétalisation du site. Deux mille arbres seront plantés, formant une forêt urbaine en rupture avec l’atmosphère 100 % minérale qui règne aujourd’hui. La mixité sera quant à elle le maître mot de cette transformation ambitieuse : des logements, des bureaux, des commerces, des programmes artistiques et gastronomiques pour faire vivre un projet urbain ouvert sur la ville et non plus centré sur lui-même.