Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, Rotterdam est largement défigurée par les bombardements. La ville fait alors le choix de l’audace : plutôt que de reconstruire à l’identique les bâtiments détruits, elle devient le terrain de jeu des architectes modernes, puis post-modernes. En témoignent des expérimentations surprenantes, comme les « maisons cubes » de l’architecte Piet Blom, achevées en 1984. Trois décennies plus tard, celles-ci voisinent désormais avec le spectaculaire Markthal de MVRDV, signe évident que la ville n’a rien perdu de son avant-gardisme architectural.
Avec ce marché couvert, abrité sous une voûte de logements, l’agence néerlandaise a signé en 2014 l’un des nouveaux emblèmes de la ville. Le cabinet dirigé par Winy Maas, Jacob van Rijs et Nathalie de Vries s’apprête à récidiver : en 2021, les trois associés vont en effet inaugurer le Depot Boijmans Van Beuningen, un bâtiment à l’aspect aussi unique que son usage. Conçue pour accueillir les 151 000 œuvres qui composent la collection du musée Boijmans Van Beuningen, cette « machine dédiée à la conservation » doit donner naissance à « une nouvelle typologie de musée » selon Sjarel Ex, directeur de l’institution.
Actuellement en construction au nord du Museumpark, dans la continuité de Witte de Withstraat, l’une des artères les plus animées de la ville, le Depot n’a pas vocation à accueillir des expositions. En revanche, des visites guidées personnalisables sont prévues pour satisfaire les visiteurs intrigués par une collection qui s’étend du Moyen-Age à nos jours. Libre à eux de privilégier la consultation des peintures, sculptures, photographies ou pièces de mobilier réparties dans des salles adaptées à leur conservation. D’autres espaces vont d’ailleurs mettre en lumière les techniques de restauration et de préservation à l’œuvre au sein du bâtiment imaginé comme un gigantesque pot de fleur miroitant.
Avec sa forme évasée, le Depot réduit son empreinte au sol tout en s’élargissant progressivement pour éviter d’atteindre une hauteur trop importante. L’édifice cumule ainsi 15 500 m² de programmes sans dépasser les 40 mètres de haut. Une façon de s’intégrer harmonieusement dans Rotterdam, qui s’ajoute au 1 064 miroirs de son enveloppe. « En réfléchissant son environnement, le volume tend à se dissoudre dans la végétation du parc », explique Arjen Ketting, associé au sein du cabinet MVRDV.