Cette année, on croisera à la Biennale Intérieur Courtrai en plus des éditeurs belges, aussi bien le Français Coédition, que l’Italien CC-Tapis ou le Danois Fritz Hansen. Si la Biennale Intérieur est si moderne, c’est le résultat d’une volonté affirmée dès ses débuts. Sous la houlette de son premier président, Jozef de Jaegere (1925-1995), les fondateurs se sont fixé une mission tournée vers la prospective. Le plus étonnant, c’est que dans le premier catalogue de la Biennale Intérieur en 1968, le mot design ne figure même pas !
Cela n’a pas empêché la manifestation de rencontrer immédiatement un succès public, qui ne s’est jamais démenti depuis. Le premier invité d’honneur de la Biennale est un philosophe, Simon Mari Pruys (1927-1980). Raymond Loewy en invité d’honneur lors de l’édition de 1970 est scotché par l’architecture de la grande halle construite exprès. « C’est une cathédrale gothique », s’esbaudit-il. Les photos de l’époque le montrent tout sourire face au fauteuil UP5 dit La Mamma, conçu par Gaetano Pesce en 1969. Lors des éditions suivantes, des personnalités de premier plan découvrent à Courtrai le design de leur temps : Gio Ponti en personne à 81 ans mais aussi Verner Panton, le prince Albert de Liège, futur roi des Belges…
Aujourd’hui encore, il y flotte un air d’authentique intérêt pour le design. Faire du business n’empêche pas de faire circuler des idées et de la culture ! Les expositions de la Biennale Intérieur sont souvent audacieuses par leur propos et ne misent pas que sur l’esthétique. Intéressant de noter que cet événement a été fondé par l’Intérieur Foundation et pas par un groupe d’entrepreneurs. Elle ne vit donc que des revenus générés par la manifestation. Elle a pu ainsi choisir ses invités d’honneur sur la seule considération de leurs mérites sans les considérer comme des vedettes.
C’est donc sans aucun cirque médiatique que les visiteurs découvrent cette année Frederik Delbart en designer de l’année. En déambulant dans les allées (à la longueur raisonnable…), on découvrira cinq installations, notamment celle en tubes d’acier galvanisé de Studio Verter (Claudio Saccucci & Roxane Van Hoof), des architectes basés entre Rotterdam et Gand, ainsi qu’une autre du designer londonien à suivre Adam Nathaniel Furman. Courtrai a la taille idéale pour éviter qu’un designer ne disparaisse dans un torrent d’informations.
Côté expositions, la designer hollando-néo-zélandaise Sabine Marcelis investira, elle, l’hôpital St Marteen. C’est comme un signe. Exposer à Courtrai est parfois le dernier moment de calme avant d’accéder à la gloire. On se rappelle y avoir vu tranquillement l’exposition d’un certain Michael Anastassiades avant qu’il ne devienne une star. Egalement à ne pas rater, les jarres en céramique high-tech du duo anversois venu de la mode Harvey Bouterse et Wouter Houste.
En résumé, Courtrai, c’est la promesse d’une expérience complète, jamais dépourvue de sens, voire d’émotions. Il faudra y tester la convivialité belge dans des restaurants éphémères conçus par des designers. On n’y mange jamais n’importe comment ou assis sur n’importe quoi ! Cette année, ne manquez donc pas le Café Gyproc, qu’est en train de terminer le designer Julien Renault avec son compère Paul Vaugoyeau. Personne de sérieux n’est jamais revenu de Courtrai sans avoir découvert quelque chose…
> Biennale Intérieur. Du 18 au 22 octobre à Courtrai (Belgique).