12 décorateurs face à la photo : Pierre Yovanovitch, la singularité

La première rencontre de Pierre Yovanovitch avec la photo, ce fut un tirage de John Coplans, sans doute l’une de ses premières acquisitions. Un travail très fort où il se prend pour modèle et livre son corps nu à l’objectif. Un choc.

Qu’apporte la photo dans un intérieur, par rapport à d’autres modes d’expression artistique ?
Pierre Yovanovitch : Dans un projet, elle doit avant tout dialoguer avec ce qui l’entoure. Certaines sont si puissantes qu’elles risquent d’écraser tout ce qui se trouve à proximité. L’essentiel est donc de découvrir le juste équilibre, une forme d’harmonie afin que se crée un échange entre l’architecture et les pièces choisies.

Quel style de photos demandent vos clients lorsque vous en sélectionnez pour eux ?
Ils nous font confiance. Une photo doit avoir une portée en soi, une certaine force, et ne pas simplement s’inscrire dans un projet de décoration.

Faites-vous appel parfois à des sociétés spécialisées dans le placement d’œuvres d’art dans vos chantiers ?
Non, mes clients me choisissent pour mon œil et pour la singularité de mes propositions.

Pierre Yovanovitch, c’est le restaurant Le Connaught, d’Hélène Darroze, à Londres et l’hôtel Le Coucou, à Méribel (Maisons Pariente). C’est aussi une seconde exposition de mobilier « Love » à la galerie R & Company, à New York, dont il a également signé la scénographie, et un premier livre chez Rizzoli.
Pierre Yovanovitch, c’est le restaurant Le Connaught, d’Hélène Darroze, à Londres et l’hôtel Le Coucou, à Méribel (Maisons Pariente). C’est aussi une seconde exposition de mobilier « Love » à la galerie R & Company, à New York, dont il a également signé la scénographie, et un premier livre chez Rizzoli. © Luc Frey

Achetez-vous des photos à titre personnel ?
Oui, et je recherche avant tout la rareté, l’originalité, l’avant-garde, le côté précurseur.

La plus belle photo selon vous ?
Rhein II, d’Andreas Gursky, pour son côté graphique et minimal, pour sa pureté.

Un ou une photographe que vous aimez tout particulièrement ?
Karl Blossfeldt pour son travail autour des végétaux et de l’ornementation. Un visionnaire dans ce domaine, qui a inspiré des artistes comme Robert Mapplethorpe. Et puis John Coplans, qui a photographié son corps sans fioriture, en le découpant en sections, des pieds jusqu’à ses mains ridées. Une perception crue du corps nu et vieillissant.

Dans la maison de Pierre Yovanovitch, à Paris, une sculpture en bronze Abstract Sculptures (Sitting Big), d’Erwin Wurm ; au mur, Assuan I, Ägypten, une œuvre du photographe allemand Elger Esser (Galerie Thaddaeus Ropac).
Dans la maison de Pierre Yovanovitch, à Paris, une sculpture en bronze Abstract Sculptures (Sitting Big), d’Erwin Wurm ; au mur, Assuan I, Ägypten, une œuvre du photographe allemand Elger Esser (Galerie Thaddaeus Ropac). © Jean-François Jaussaud / LUXPRODUCTIONS

Vous êtes plutôt noir et blanc ou couleur ?
Les deux.

Et si vous échangiez votre blouse d’architecte contre celle de photographe ?
Mon œil tendrait naturellement vers l’architecture.

Fréquentez-vous les foires et les salons consacrés à la photo ?
Oui, bien sûr. Les meilleurs sont Paris Photo et l’AIPAD à New York. Je me rends également régulièrement dans des galeries comme la Yossi Milo Gallery à New York.